lettre à 2020
Chère 2020, quelle année. De mon plus d’un quart de siècle, j’en avais connu des années difficiles, deux en particulier mais j’ai l’honneur de t’informer que tu viens d’intégrer le top 3. Congratulations ! * Petite musique de victoire digne du « Juste Prix »*
L’année à commencer pourtant avec la plus belle des nouvelles : une naissance, celle de ma filleule. Mon soleil. Après une attente inquiétante, j’ai appris sa naissance à 100km de la maternité, à devoir attendre le cœur lourd le week-end pour rentrer embrasser ma sœur, mon beau-frère et prendre dans les bras cette merveille. Je vous laisse imaginer l’excitation que j’ai ressenti le samedi venu quand j’ai pu aller la voir pour la première fois, émue comme une jeune enfant découvrant un cadeau au pied du sapin. Moi j’ai découvert un morceau d’amour dans les bras de ma petite sœur, devenue mère. Je n’ai pas pleuré (pas extérieurement) mais je t’ai tenu dans les bras toute une après-midi en l’admirant, petit soleil. Cette chanson je lui ai d’ailleurs chanté à maintes reprises « You are my sunshine, my only sunshine, you make me happy when skies are gray. You’ll never know dear how much I love you so don’t take my sunshine away » (je m’en suis tenu à ce couplet, le reste de la chanson est triste à mourir, I know).
Puis en regardant cette boule d’amour, de pureté, d’innocence dont on venait de me confier la lourde responsabilité de veiller sur elle, j’ai été heurtée d’une tempête d’une force 10000 en pleine face. Comment pouvais-je devoir veiller sur cet enfant et lui montrer l’exemple quand je n’étais pas en phase avec moi-même? Comment avoir le privilège d’avoir dans les bras 3kg de vérité quand rien n’était vrai en moi. BAM. Round 1, KO complet. Allo, Houston ? Are you here ?
Une remise en question d’une ampleur sans précédent – et dieu sait que je suis Madame remise en question – s’est donc mise en place dès le soir même. Une envie de tout quitter, de reprendre à zéro, de ne plus subir, de ne plus se mentir, de ne plus se cacher. De ne plus accepter de vivre « comme ça », en attendant mieux, que cela s’arrange, que les choses bougent, de ne plus accepter de subir, de suivre, de SURVIVRE.
Deux semaines plus tard, ma très chère 2020, tu m’offres une ribambelle de symptômes qui me donnent l’impression d’être percutée par un bus chaque jour un peu plus. La prise de sang révèlera que gentille comme je suis, j’ai décidé d’héberger pour quelques temps madame mononucléose. KO technique numéro 2, message de mon corps : Houston, we have a problem.
Puis 2020, le premier trimestre devait être l’année celui des plus beaux voyages de ma vie.. Adios Venise et son carnaval. Adios la Floride et son road trip. En réalité je ne vous dit pas Adieu mais à plus tard, quand les astres seront mieux alignés…
Voilà, mars 2020, un étrange concept, une nouveauté: NOUS SOMMES EN GUERRE. Une pandémie, une certaine Covid19 semble vouloir pimenter l’année, ouh la coquine.
Tu nous laisses donc, cher mois de mars, quelques heures pour faire nos valises, embarquer le chat afin que l’on puisse se confiner dans le bomker du Nord, chez nos parents, près de nos proches, là où est toujours mon cœur à vrai dire. J’y ai redécouvert le bruit des oiseaux, le silence le soir et la beauté de la nature au printemps. Confirmation : région parisienne tu n’es vraiment pas faite pour moi MAIS ALORS PAS DU TOUT ! D’ailleurs je te déteste, voilà c’est dit.
Il y a des retours à zéro, des moments où l’on perd tout, où l’on se perd, où l’on pense perdre les autres. Où les larmes coulent plus que les sourires ne s’affichent. Il y a des questions que l’on se pose, la peur du jugement des autres, la colère des mots que l’on entend. La frustration de ne pas être compris.
Ah 2020, il y a eu des lettres de démissions qui ont abouti à un reclassement sur un nouveau chemin de vie. Mais il y a eu aussi une démission sans préavis, en silence, sans bruit, violente qui laisse un vide infini et une impossibilité d’effacer un nom dans le répertoire de son téléphone.
Il y a eu des appels que l’on souhaite ne jamais recevoir et ceux qui vous font immédiatement switcher le cerveau en mode « gestion de crise », où les sentiments sont mis de côtés puis vous reviennent en pleine gueule quand la crise est stabilisée. KO technique numéro 3 : Houston, we really REALLY have a problem.
2020, tu es l’année des décisions : celles que l’on prend et celles qui s’imposent aussi.
Décision 1 : quitter cette région parisienne et revenir chez moi, auprès de mes proches, là où je me sens le mieux. Il y a donc des nouvelles clefs, des nouveaux meubles, des nouvelles déco, des nouveaux tout. Des prises de risques, des envies de changement et d’avancer.
2020, tu es l’année des alertes, des « non » que l’on lance, que l’on impose, que l’on crie et qui ne sont pas écoutés.
Puis il y a le corps, le coeur, l’esprit, tout votre être qui un beau matin décide de débrancher tous les câbles : ON ARRÊTE LÀ. Erreur 404. On a beau dire non, on a beau essayer, on a beau prendre des décisions, le mal est fait et les dommages sont pour le moment irréparables.
KO Technique 4: redirection exigée. Houson, we are very BUT ALORS VERY dans la m*rde !
Il y a des vagues à l’âme (pour citer Mersea People), des seins mutilés pour lutter contre un crabe et une femme que l’on voit tel un arbre d’automne qui perd ses feuilles en plein mois de juillet. Une confusion des saisons sur le visage d’une grand-mère qui en a pourtant déjà trop vu.
Il y a des corps qui restent et des âmes qui s’envolent déjà vers là-haut. Des demi-deuils qui semblent impossibles à faire. Il y a alors des sourires, des acquiescements au non-sens complet, dites-moi, ne serais-je pas temporairement dans l’Upside Down ?
Il y a des masques que l’on doit porter, des sourires cachés qui nous forcent à chercher la lumière dans les yeux des gens. J’en ai vu de la lumière et j’ai essayé d’en donner. 2020, tu as caché mon sourire imparfait mais j’ai répliqué en souriant 10 fois plus fort pour que les ridules aux coins de mes yeux soient assez visibles pour combler cela.
2020, il y a eu des lettres, des rendez-vous, des entretiens, des « non », des désillusions, des espoirs.
Il y a eu une peine immense mais une envie folle de s’en sortir, une motivation à toute épreuve.
2020, tu ne m’as pas empêché d’essayer une nouvelle fois d’aller de l’avant !
Il y a des doutes derrière une envie de bien faire, de vouloir prendre la bonne autoroute, l’envie de ne plus se planter de direction. Il y a des cages que l’on décide d’ouvrir définitivement après 16 ans d’enfermement. Il y a des découvertes sur soi que l’on ne soupçonne pas. Il y a des choses que l’on déterre et qui nous chamboulent. Il y a des rechutes que l’on aurait préféré ne jamais revivre, des compteurs dans la tête et des portes de placards qui recommencent à poser problème.
2020, le phœnix a brûlé une seconde fois, il renaitra de ses cendres en 2021.
2020, il y a des sourires, des fous rires, des danses, des éclats de rire. Des bisous baveux et des couches bien trop garnies et des petits pieds qui puent qui malgré tout, ont fait fondre mon cœur.
Il y a les premiers pas d’un soleil, les premiers signes d’une complicité et cet amour qui vous en déchire le cœur tellement il est grand. 2020 je suis devenue marraine d’un bébé génie que je pourrais couvrir de bisous jusqu’à ce que mort s’en suive.!
Il y a des larmes, des bleus au cœur, des « je t’aime mais » qui luttent comme les vagues contre les rochers à Quiberon. Des « doit-on continuer ? » et des projets qui fusent en parallèle. Mais quand on s’aime profondément, quand c’est une connexion câble ethernet de cœur à cœur, comment peut-on faire autrement que vouloir mener à bien ces projets au-delà des difficultés et du brouillard ?
2020, tu aurais dû être l’année de la grosse fiesta pour les 90 ans de mamie. Tu aurais dû être l’année des plus beaux concerts de ma vie : Queen & Elton John. Je suis à deux doigts – il est actuellement trop tard et aucune dérogation au couvre-feu ne permet une telle transgression des règles, hélas- d’aller allumer des cierges pour que ces concerts reportés ne soient pas annulés. La culture, les spectacles, les concerts me manquent. J’ai acheté une tonne de livre entre les deux confinements de peur que l’on nous retire le droit d’avaler des lignes de mots (visionnaire moi ? Uniquement pour la mode !).
Ma chère 2020, tu es l’année où j’ai signé de nouveau dans un club de sport. J’y ai débuté sérieusement les pilâtes puis découvert que la petite danseuse que j’avais été ne m’a pas suivie dans l’âge adulte. Chère COVID, je sais que moi et sport c’est étrange dans la même phrase mais de là à tout fermer pour que je ne puisse plus y aller ? C’est rude !! Alors pour compenser, pour décompresser, pour écouter mon petit corps, j’ai commencé en mars puis recommencer en octobre à écumer les vidéos de Yoga et de méditation sur Youtube.
2020 tu es l’année où j’ai décidé de reprendre l’écriture d’un blog, d’avoir un Instagram public (vous n’imaginez même pas le défi que cela représente pour moi). On se cache parfois, de peur de tomber sur des mauvaises personnes. Et grâce à cela, en 2020, il y a eu des rencontres. Des belles rencontres qui découlent d’initiatives personnelles. Mais il y a des petites lumières qui éclairent un bout de votre chemin, de votre vie, de votre confiance, de votre espoir. Il y a des gens qui échangent quelques mots, quelques sourires, quelques douceurs pour le cœur, qui vous font confiance, qui vous offrent de leur temps, de leur talent, de leur collection. Merci à vous, petites paillettes qui ont su illuminer mon quotidien par-ci, par-là.
2020, tu es l’année où la famille a pris un nouveau sens. Une nouvelle dimension. Une nouvelle fusion. On ne se rend pas toujours compte de la chance que l’on a de pouvoir les prendre dans les bras. De leur dire je t’aime autrement qu’au travers d’un écran. J’ai eu peur pour eux. J’ai encore peur pour eux d’ailleurs.
Il y a eu aussi cette prise de conscience : c’est du grand n’importe quoi cette consommation de masse ! Peu importe qu’elle soit neuve, issue de la fast-fashion ou de la seconde main : si j’en ai pas besoin, si j’en ai déjà, si ce n’est pas une pièce coup de cœur ultra originale et atypique, alors pourquoi acheter ? Pour soulager mon moral ? La blagounette, ce sérum Sephora de 1) ne te fera pas ressembler à Dita Von Tesse et de 2) n’aura pas l’effet de la baguette magique de la fée clochette. Cela fonctionne également pour les fringues que tu achètes sur un coup de tête alors que tu ne porteras jamais ce truc.
Tri, rangement, grosse réflexion avant un achat. En revanche, si tu tombes follement amoureuse d’une paire d’irregular choice introuvable ou d’une robe atypique, là, tu peux sortir ta CB. On a dit réfléchir pas se priver. Le colibri : je fais ma part.
2020 idées de DIY m’ont traversées l’esprit. J’en ai des idées pour recycler, donner une seconde vie, essayer de nouvelles choses avec des matières que je pensais inutiles, fatiguées. Il va falloir 2021 dose de motivation pour que je m’y mette sérieusement l’année qui arrive.
2020, bien que l’année n’ai pas été financièrement facile, j’ai voulu avec mes petits moyens aidé des associations, des gens et je l’ai fait avec tout mon cœur et ma bienveillance. Parce que oui, chère année 2020, je ne suis pas à plaindre, il y a eu pire que moi. Il y a toujours pire que soi. Et qu’il n’y a pas besoin d’avoir un porte-monnaie qui déborde pour aider.
Je ne suis pas à la rue. Niveau santé, je le conçois, le point n’est pas dans mon camp. Il ne l’est pas dans les autres domaines non plus. Mais je ne suis pas seule. J’ai passé Noël entourée des gens que j’aime mais j’ai eu le cœur serré en pensant à mes grands-mères qui sont restées isolées.
J’ai eu des cadeaux alors que je n’en mérite pas autant. J’ai eu de l’amour en cargaison. Je sais que beaucoup n’ont pas eu cette chance, n’ont pas cette chance.
Alors j’ai voulu donner, à mon petit niveau, avec mes petits moyens, à des gens qui n’ont pas ma chance. Si je le dis, ce n’est pas pour avoir une médaille, c’est simplement pour montrer que même avec peu, on peut le faire.
2020 tu es l’année où j’ai une nouvelle fois tout perdu. Tu es l’année de ma tempête personnelle. Tu as remis les compteurs à 0. Je ne sais pas ce que va me réserver 2021 mais je sais qu’un second soleil viendra illuminer ma vie alors que je garde espoir. Je garde en mémoire également les beaux moments, les rencontres, les sourires, les joies, les fous rires, les petits succès, les petits mots. Je m’en nourris. Je m’en enrichie.
Alors ma chère année 2020, que penses-tu d’une trêve pour les derniers jours de ton règne ? Une sorte de paix jusqu’à ce que 2021 vienne te succéder, c’est possible non ?
2020, pour finir, je dirai que bien que tu sois une des pires années de ma vie pour le moment, tu m’as permis d’apprendre beaucoup de choses qui vont changer ma façon de voir les choses et d’avancer dans les semaines, mois et années à venir. Tu m’as permis de rencontrer de belles âmes. Et le plus important, au-delà de la douleur, c’est de retenir le positif de tout cela, la leçon de cette longue expérience de 12 mois…
J’espère que votre lettre à 2020, quelque soit son contenu, aura la même fin que la mienne: prenons les leçons de cette année pour avancer et cette expérience pour faire de sa vie quelque chose que l’on aime à partager avec des gens que l’on aime…
